En septembre 1607, les tiercelines sont autorisées à s’établir à Salins, à la condition de n’y faire aucune quête pour la nourriture, l’entretien et la construction de leur couvent. Composée de quatre moniales, la communauté avait été fondée en 1604 à l’initiative de Marguerite Borrey dans le bourg de Vercel, dans le comté de Bourgogne. D’abord accueillies dans l’hospice de Saint-Bernard, les religieuses achètent en 1608 à François de Chartenay et sa femme Marie-Alexandrine de Gilley le meix Palouset, un terrain situé non loin de l'endroit où elles sont hébergées, entre la porte de Chambenoz et la chapelle Saint-Pierre-le-Martyr.
La construction du couvent, ainsi que celle de l'établissement de Gray, est partiellement financé par des aumônes autorisées par l'archiduc en 1616 et 1617. Les travaux s'échelonnent entre 1608 et 1620, date à laquelle l’église est consacrée. En juin 1614, les tiercelines de Salins sont agrégées à la congrégation des religieux de l’étroite observance du tiers ordre de Saint François. L’ordre connait un grand succès dans le second quart du 17e siècle, et divers couvents sont créés, à Gray en 1611 (par six religieuses salinoises), Dole en 1614, Lyon en 1616, Lons-le-Saunier en 1644 et Arbois en 1649. En 1643, l’établissement salinois acquiert une grange au sud du couvent et y établit un hospice, qui sera tenu en 1648 par deux frères cordeliers et un frère de leur ordre.
Un " bâtiment des religieuses" est construit en 1707-1708 à l'est. Mesurant sept mètres de large pour quarante mètres de long, il abrite des appartements au rez-de-chaussée, le réfectoire et les cuisines au premier étage et deux dortoirs aux deuxième et troisième étage, chacun accueillant " 22 chambres ". Dans la cour au nord, au joignant de ce bâtiment prend place le " choeur ". Construit en 1706, il abrite " au dessous [...] de bien beaux greniers à bled, et au dessus [...] un bel oratoire qui prend vue sur l'église et ou les malades vont entendre la messe ". Le couvent compte aussi un petit bâtiment abritant trois parloirs, un édifice abritant une boulangerie au rez-de-chaussée, l'infirmerie au premier étage (deux chambres), et une bibliothèque et deux pièces au second étage. Le bâtiment des novices et pensionnaires, construit vers 1730, comprend un chauffoir pour les religieuses au rez-de-chaussée et deux chambres pour les pensionnaires aux deux étages. Longue de 21 mètres sur 10 mètres de largeur, l'église possède un plafond en bois ainsi qu'une " chapelle renfoncée dédiée à la Sainte Vierge qui est en perspective du choeur des religieuses ".
Le nombre de " mères tiercelines " passe de 26 en 1687 à 40 en 1752. A cette date, le couvent possède des biens dans onze villages alentour, totalisant 5622 livres de rente annuelle. Le montant des revenus atteint 6607 livres en 1767 et 8091 livres en 1790, à quoi il faut ajouter 58 ouvrées de vignes (soit environ 230 ares). L’établissement abrite encore vingt moniales et six converses en 1790. A la Révolution française, l’église et le couvent sont vendus comme bien national à Velu, Tournier, Bouvier et Rouvieux. Les bâtiments ont été progressivement démantelés, et les matériaux vendus pour la maçonnerie. Une carte postale datant de la charnière des 19e et 20e siècles montre cependant des élévations de murs assez importantes. Il ne reste aujourd’hui aucun vestige visible des bâtiments, qui ont laissé place à des jardins en terrasse.
Raphaël Favereaux, chercheur. Région Bourgogne-Franche-Comté, Service Inventaire et Patrimoine, 1995-