Poupard, Laurent. Chercheur au service Inventaire et Patrimoine de la Région Bourgogne-Franche-Comté, 1987-
- patrimoine industriel, patrimoine industriel du Doubs
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Dourlot SoniaDourlot Sonia
Sonia Dourlot, photographe. Région Bourgogne-Franche-Comté, Service Inventaire et Patrimoine, 2014-2020
- (c) Région Bourgogne-Franche-Comté, Inventaire du patrimoine
Dossier non géolocalisé
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Aires d'étudesPays de Montbéliard (le)
Le Pays de Montbéliard : pendules et montres
La région de Montbéliard inaugure à la fin du 18e siècle, pour l'horlogerie comtoise, une première mécanisation de la production qui verra la constitution de la plus grosse entreprise horlogère française : Japy.
Petite enclave protestante rattachée à la France en 1793, la principauté de Montbéliard est depuis le 17e siècle le siège d’une industrie métallurgique et de transformation des métaux dynamique. Ses relations privilégiées avec la Suisse ne sont pas pour rien dans l’introduction de l’horlogerie au milieu du 18e siècle et en 1793, une soixantaine d’horlogers est attestée à Montbéliard. Ce n’est toutefois pas la production de montres et pendules qui caractérise cette zone mais bien celle des ébauches et mouvements.
Constituant le châssis sur lequel sont fixés les composants du mouvement, l’ébauche est au 18e siècle formée de deux platines en laiton séparées par des piliers, aussi bien pour la pendule que pour la montre. Plus petite, l’ébauche de montre porte le barillet (contenant le ressort moteur) et la fusée (régularisant la force motrice) jusqu’à sa modification, à la fin de ce siècle ou au début du suivant, par Jean Antoine Lépine qui supprime la deuxième platine (remplacée par des ponts) et la fusée, obtenant ainsi des montres bien plus plates. Cette ébauche (ou « blanc ») devient un « blanc roulant » après que le finisseur lui a ajouté le « rouage » ou « finissage » (ensemble de roues dentées et pignons) et a retouché les pièces afin qu’elles jouent librement. Pour que le mouvement soit complet, il ne manque plus que l’échappement, posé par le « planteur d’échappement ». L’établisseur peut alors prendre la suite.
Le Dr Muston rappelle en 1866 : « L’industrie horlogère du pays de Montbéliard n’établit pas la montre en entier, elle ne s’occupe que d’un certain nombre de parties, ses produits sont envoyés aux établisseurs de Besançon et de la Suisse. Les ébauches et les finissages sont les deux parties qui occupent plus particulièrement les ouvriers de notre contrée. Ces deux parties en effet se prêtent mieux que les autres au travail des grandes fabriques [...] L’emploi de nombreuses machines automatiques a simplifié beaucoup cette fabrication. » (Muston, Etienne. Recherches anthropologiques sur le pays de Montbéliard, 1866, p. 398). Dans la zone, l’horlogerie est en effet avant tout une industrie mécanique du composant, et ce depuis Frédéric Japy dans le quatrième quart du 18e siècle.
1776, Frédéric Japy
L’histoire de Frédéric Japy (1749-1812) est bien connue : fils d’un maréchal-ferrant de Beaucourt (Territoire de Belfort), il entre en 1768 en apprentissage chez un horloger du Locle, Abraham Louis Perrelet, renommé pour les perfectionnements qu’il apporte à l’outillage, puis il est embauché en 1770 chez le guillocheur Jean-Jacques Jeanneret-Gris, inventeur de machines-outils pour l’horlogerie. Il s’établit en 1771 à Beaucourt, où il fabrique des ébauches de montre, qu’il vend à La Chaux-de-Fonds.
En 1776, Frédéric rachète les machines de Jeanneret-Gris et lui en commande dix nouvelles de son invention (qu’il brevètera en mars 1799). Cette mécanisation marque une rupture : elle initie une production en série (et non plus à l’unité), nécessitant moins de compétences des ouvriers (moins formés donc plus nombreux donc moins payés), et s’accompagne de la remise en cause du modèle d’organisation du travail en vigueur dans l’horlogerie, qui privilégie le travail à domicile. La parcellarisation des tâches (travail « en parties brisées »), qui prévaut au sein de l’établissage, conduit en effet à une spécialisation poussée (tel ouvrier pouvant n’effectuer qu’une opération) d’où un nombre élevé d’intervenants, travaillant chez eux. Or Japy réunit ses ouvriers dans la fabrique qu’il fait bâtir en 1777 - la « Pendulerie » - et actionne ses machines à l’aide d’un manège à chevaux et non plus à la main. Le rendement s’accroit énormément, et avec lui la production : près de 30 000 ébauches avec une cinquantaine de personnes vers 1780, 100 000 en 1800, 150 000 avec 500 personnes en 1806. Le prix des ébauches est divisé par trois (il passe de 7,50 francs à 2,50 francs, chiffres de 1794). Japy exporte les neuf dixièmes de sa production en Suisse (où son principal concurrent, la Fabrique d'Horlogerie de Fontainemelon créée en 1793, ne fera construire son usine qu’en 1816) et vend le reste à Montbéliard et Besançon.
Ces résultats lui donnent une situation de monopole sur le marché, d’où les récriminations des autres fabricants et ouvriers en 1802 : « ces machines en abrégeant infiniement l’ouvrage ôtent à quantité d’ouvriers de gagner leur vie » (Lettre collective d’horlogers montbéliardais à leurs homologues de Genève, Besançon et Saint-Imier, 3 décembre 1802. Citée par : Lamard, Pierre. Histoire d’un capital familial au XIXe siècle [...], 1984, p. 51.). Ce à quoi il réplique : « je donne dans mes ateliers du travail à plus de 500 ouvriers, la plupart estropiés vieillards et enfants », sans compter qu’une partie du personnel travaille encore à domicile (« en chambre », de là leur nom de « chambrelans ») à certaines tâches non mécanisables (montage du rouage, réglage, etc.). Il n’en demeure pas moins vrai qu’avec lui, l’horlogerie entre dans une dimension industrielle que confirme encore cette appréciation rédigée en 1819 sur la fabrique d’ébauches de Badevel, qui « occupe 80 ouvriers, dont moitié sont des enfants au-dessous de 14 ans ; parmi les autres ouvriers il n’y a que deux horlogers. Tout s’y fait à la mécanique. » (Notice sur les fabriques et manufactures du département du Doubs, qui ont fourni des échantillons pour l’exposition publique des produits de l’industrie française, du 25 août 1819, p. 196.).
Essor des fabriques de mouvements dans la première moitié du 19e siècle
Frédéric Japy se retire des affaires en 1806 et cède son entreprise à ses trois fils aînés - Frédéric Guillaume (1774-1854) dit Fritz, Louis Frédéric (1777-1852) et Jean-Pierre (1785-1863) -, lesquels fondent la société Japy Frères. Les gendres en sont exclus si bien que deux d’entre eux - Louis Frédéric Calame et Jean-Jacques Maillard-Salin - se sont associés l’année précédente pour ouvrir à Hérimoncourt une fabrique mécanique de pignons et rouages d’horlogerie (le « finissage »). Pour sa part, Japy Frères fait construire en 1806-1807 à Beaucourt même, à l'ouest de la Pendulerie, l’usine dite des Fonteneilles (ou « Nouvelle Fabrique »). Cette dernière, dont les machines sont elles-aussi animées par un manège à chevaux, accueille des ateliers de fabrication d’ébauches de montres mais aussi de quincaillerie (vis à bois). En effet, les Japy diversifient leurs productions (ils brevètent en 1806 et 1808 des machines à fabriquer les vis), avec une ampleur jusque-là inédite dans la région, et colonisent la vallée de la Feschotte dans le Doubs (communes de Dampierre-les-Bois et Fesches-le-Châtel). Avec succès puisque les bénéfices de la fabrication des vis dépassent dès 1815 ceux de la branche horlogère.
En 1816, la société reconstruit (et agrandit) la Pendulerie, incendiée le 1er juillet 1815 par les troupes de la Septième Coalition en représailles de l’engagement bonapartiste des Japy. Poursuivant son expansion, elle édifie en 1817 dans la commune voisine, Badevel, une usine spécialisée dans les mouvements de pendules (donc dans la grosse horlogerie), remplaçant un moulin acheté en 1803 par Frédéric Japy comme bien national. Sa production est en 1819 de 4 800 ébauches, dont un quart (pour pendules de voyage) à destination de la Suisse et les trois autres quarts pour Paris. Ces deux usines seront chacune dotées d’une machine à vapeur, Beaucourt en 1829, Badevel en 1842. En 1837, le Dictionnaire du commerce et des marchandises crédite Japy Frères d’une production mensuelle de plus de 20 000 ébauches de montres (plus de 30 000 avant la crise touchant les Etats-Unis) dont 80 % pour la Suisse, 2 300 blancs roulants de pendules (pour 400 trois ans auparavant), 1 200 mouvements pour lampes genre Carcel (dans lesquelles la mèche est alimentée en huile par un mécanisme d’horlogerie associé à un piston), 300 à 400 mouvements de « musiques » (pour pendules, montres, boîtes à musique, tabatières, etc.), 180 mouvements de métronome (vendus à la société horlogère parisienne Wagner Neveu). Les ébauches (de pendule) de base coûtent moins de 8 francs alors que celles de Saint-Nicolas-d’Aliermont (Seine-Maritime) atteignent 12 francs et qu’elles dépassaient les 120 francs au début du siècle.
En dehors de la famille Japy, il faut attendre la toute fin du 18e siècle pour que soient ouvertes des fabriques d’ébauches, à Seloncourt, à quelques kilomètres seulement de Beaucourt. Les frères Seydel créent la leur en 1799 au moulin de Berne. Ils y emploient 47 ouvriers en 1806, produisant 600 ébauches par jour, et se lancent dans la production de l’acier mais leur affaire périclite au cours de la décennie suivante et le site est racheté en 1818 par Japy Frères. Pour sa part, Charles-Frédéric Beurnier, « maître horloger et cadracturier » (fabricant de cadratures, c’est-à-dire de mécanismes de sonnerie à répétition), établi à Seloncourt vers 1798, ouvre en 1810 un atelier dans la Grande Rue (actuelle rue Viette). En 1817, il associe à l’affaire ses deux fils, formés chez Japy. En 1819, la société Beurnier Frères - signalée comme « l’une des deux manufactures de ce genre que possède la France » - produit près de 50 000 mouvements et ébauches de montre vendus en Suisse (un vingtième seulement l’est en France). Elle emploie 126 ouvriers, 180 en 1858, 112 en 1865 et fabrique à cette date 57 600 ébauches de montres et finissages.
Société hors norme par sa modernité dans le paysage industriel du pays de Montbéliard, la société Japy forme un personnel nombreux, dont certains (tels les fils Beurnier) n’hésitent pas à s’établir à leur compte.
A Montbéliard voit ainsi le jour en 1823 l’entreprise Vincenti et Cie, créée par Jean Vincenti (1786-1833), horloger d’origine corse passé par Paris et la Suisse puis employé depuis 1817 par la maison Japy (pour laquelle il réalise des montres à répétition). Vincenti s’établit dans une maison aux 5 et 7 place Saint-Martin puis en 1824 dans une aile du château, où il emploie l’année suivante 35 à 40 personnes. Semblable en cela à Japy, il invente des machines pour la fabrication des montres, machines qui - selon lui - peuvent chacune remplacer 40 à 80 ouvriers. Il avance que le personnel prévu (environ 250 ouvriers), « dont la presque totalité prise parmi les enfants, n’aura besoin d’aucune connaissance dans l’horlogerie ni de faire aucun apprentissage préliminaire » et que son affaire « occupera un nombre considérable de bras employés aux parties qui accompagnent la fabrication des montres, tels que monteurs de boîtes, doreurs, graveurs... » (Lettre du 15 mai 1823. Citée par : Lamard, Pierre. Histoire d’un capital familial au XIXe siècle [...], 1984, p. 94.). En 1827, il abandonne toutefois la mise au point de ses machines (il y en a alors 88 de 40 sortes différentes) pour se consacrer à celle d’autres pour pendules (plus de 150), qui doivent lui permettre de réaliser des blancs roulants. Ses difficultés financières le conduisent à s’associer avec Albert Roux le 24 octobre 1829. Il décède le 23 mars 1833, alors que l’entreprise fabrique 600 mouvements par mois (soit environ 7 000 par an).
Roux transfère l’affaire en novembre 1833 dans l’usine de la Petite Raisse, créée vers 1773 au lieu-dit la Prairie, qu’il dote de nouveaux ateliers (30 B et 31 avenue du Maréchal Joffre). Sa production décolle enfin (elle dépassera les 60 000 pièces en 1864), consistant en mouvements de pendule, de carillon et de réveils de voyage, mais aussi élargie aux mécanismes pour boîtes à musique, lampes à huile Carcel, métronomes, compteurs de filature, miroirs aux alouettes puis aux télégraphes électriques (récepteurs Morse), régulateurs de chemin de fer, rouages pour compteurs à eau et à gaz, etc.
Une autre grande entreprise apparaît à la fin de la décennie 1830 : L’Epée, à Sainte-Suzanne (Doubs). En mai 1839, Auguste L’Epée, qui a longtemps travaillé chez Japy à Beaucourt, s’associe avec le Genevois Pierre-Henri Paur pour fonder la société Paur et L’Epée dédiée à l’exploitation d’une manufacture de boîtes à musique (peut-être créée par le Suisse dès 1833). Elle s’installe dans une ancienne ferme et produit des mécanismes pour coffrets à bijoux (cartels, tabatières, etc.) ou intégrés à des socles de pendules ou des cadres de tableaux. Elle élargit vers 1850 la fabrication aux porte-échappements pour réveils et pendules de voyage. En 1859, elle emploie plus de 150 ouvriers (30 en 1845) et produit plus de 24 000 « musiques ». Elle fait construire en 1862, de l’autre côté de la route, une usine à vapeur, agrandie dès 1868.
Une industrie dynamique au milieu du 19e siècle
Bien que sujette à de fréquentes crises tout au long de son histoire, l’industrie horlogère est florissante au milieu du 19e siècle. La société Japy Frères est dopée par la demande de l’horlogerie suisse, qui trouve de nouveaux débouchés. Sa production d’ébauches de montre fait plus que doubler entre 1839 (230 400) et 1854 (500 000) tandis que celle des ébauches et mouvements de pendules passe de 42 000 en 1843 à 60 000 en 1854. Ne pouvant arriver à satisfaire la demande des fabricants de montre, elle est à l’initiative de la création en 1849 de la Société industrielle de Moutier-Grandval, à Moutier (canton de Berne, Suisse), fabrique d’ébauches travaillant en sous-traitance pour elle et qui occupera 581 personnes en 1884 (elle produira aussi des montres finies). Les mécanismes de pendules sont expédiés en quantité à Paris, où ils sont achevés si nécessaire et emboîtés dans des cabinets de bois, marbre, bronze, etc. (d’où l’appellation de « mouvements de Paris »). La société se lance aussi dans la finition des garde-temps bon marché : pendules et réveils (de 6 francs à 10,50 francs), fabriqués en série à partir de la décennie 1860, et montres (la « Démocratique » » doit être vendue moins de 9,50 francs, d’où son ébauche à double platine et son échappement à cylindre). En 1865, sur les 2 075 personnes employées par son usine de Beaucourt, 1 356 s’occupent d’horlogerie (620 hommes, 507 femmes et 229 adolescents entre 13 et 16 ans) et fabriquent 365 616 ébauches de montre (dont plus de 310 000 vendues en Suisse) et 273 024 finissages (190 000 pour la Suisse). L’entreprise emploie un total de 5 500 personnes en 1870. Le travail à domicile existe toujours et le plan d’une des maisons ouvrières Japy de Beaucourt, publié lors de l’Exposition universelle de 1867, montre des établis (huit places de travail en tout) disposés derrière trois des quatre fenêtres du rez-de-chaussée , ce qui est ainsi expliqué par la société : « avec notre industrie horlogère, nous pouvons donner à presque tous nos ouvriers de quoi occuper à la maison leurs femmes et leurs enfants ; la mère peut alors exercer sur sa famille une surveillance plus active et ne pas la laisser s’abandonner à l’oisiveté et la débauche » (Notice sur les habitations ouvrières à Beaucourt. Citée par : Lamard, Pierre. Histoire d’un capital familial au XIXe siècle [...], 1984, p. 253.).
Une autre société Japy a vu le jour : celle de Louis Frédéric, qui a acquis en propre en 1837 l’ancienne usine des frères Seydel au moulin de Berne (Seloncourt). Il lui redonne sa vocation horlogère et elle produit, avec 110 ouvriers, des pignons pour montres et pendules, et des mouvements de lampes et de tournebroches. Son fils Louis la convertit en 1845 à la fabrication mécanique des mouvements de montre Lépine (elle compte alors 200 personnes). Il achète en 1851 l’usine de la Chapotte (ancienne filature Peugeot) à Hérimoncourt, où il implante une fabrique de pignons (125 ouvriers en 1857), et lance en 1856 celle des échappements de montres. A cette date, la production annuelle de la société Louis Japy et Fils atteint 250 000 mouvements et 840 pendules « établies » (achevées), 12 000 réveils, 2 000 métronomes, 6 000 jouets mécaniques et 12 000 paires de templets (pièces pour métier à tisser). Elle va donc plus loin que la seule fabrication des ébauches ou des mouvements et produit aussi des pendules finies, même si cette activité est marginale. Elle fabrique en outre à partir de 1863 le laiton dont elle a besoin dans autre une usine d’Hérimoncourt, achetée aux Peugeot : le Martinet, au lieu-dit Sous Cratet (établissement aujourd’hui disparu).
En 1865, les trois plus grandes fabriques de mouvements de pendules et de réveils de la zone - à Badevel Japy Frères et Cie, à Seloncourt Louis Japy et Fils, à Montbéliard Amédée Roux et Marti - s’associent au sein de la société en nom collectif Japy, Roux, Marti et Cie. Ils mettent ainsi un terme à une féroce guerre des prix entre eux, qui a vu le coût d’un mouvement réduit de moitié entre 1858 et 1865 (passage de 12 à 6 francs). Chargée de commercialiser la production, la nouvelle société dispose d’un dépôt commun à Paris (boulevard du Prince Eugène) et en ouvre à l’étranger (Barcelone, Bruxelles, Buenos-Aires, Rio-de-Janeiro et Stuttgart). Elle est alimentée par l’usine de Badevel (670 ouvriers, 9 à 10 000 mouvements par mois soit 100 000 en 1865), par celle de Berne - qui fabrique aussi ébauches et rouages de montres ainsi que pendules et réveils finis (500 personnes, 2 500 à 3 000 mouvements achevés chaque mois, soit environ 30 000 par an) et par celle de la Prairie (agrandie en 1864 par Amédée Roux, lequel a pris la suite de son père en 1858), en mesure de réaliser 5 000 à 6 000 mouvements par mois (60 000 à 70 000 par an) avec 400 personnes. Ces entreprises, qui avaient vendu 115 200 mouvements de pendules de Paris (Japy Frères 55 400, Roux 31 300 et Louis Japy 28 500) sur un an (juin 1857-juin 1858), ont en 1865 une capacité de 300 000 pièces ; c’est le nombre de blancs roulants livrés aux horlogers parisiens en 1867.
D’autres entreprises sont apparues. A Montbéliard, le Suisse Samuel Marti fonde en 1832, en s’associant avec MM Boilloux et Mozer, la société Samuel Marti et Cie (dont il reste seul propriétaire en 1841). Son affaire est semblable à celle d’Amédée Roux (et peut-être seront-elles un temps associées à partir de 1862 ?) : 400 personnes réalisent 60 000 à 70 000 mouvements de pendules par an en 1865 (elle en avait vendu 23 600 de juin 1857 à juin 1858).
Muston signale encore en 1866 à Seloncourt, aux côté de Beurnier Frères (qui fera faillite en 1879), la société de Georges-Frédéric Vuillequez. Née d’une fabrique créée en 1857 par MM Tissot et Thourot, au lieu-dit les Noyers, cette affaire emploie 110 ouvriers plus sept enfants en 1865 et réalise 50 000 ébauches et finissages de montres. Même production pour les fabriques de Georges Gondelfinger à la Stauberie depuis 1846 (80 ouvriers et neuf enfants, affaire reprise en 1886 par Georges Megnin), Migot père (ancien directeur de fabrication à l’usine de Berne) et fils au château des comtes de Cléric à partir de 1850 (40 ouvriers et deux enfants puis 80 ouvriers en 1868, avant sa liquidation en 1874), Beaudroit Frères (200 ouvriers, 3 600 échappements et finissages par an), etc. A Hérimoncourt, il est question de Jambe (35 ouvriers) pour les pignons de montre et de Coulon Frères (30 ouvriers) pour les porte-échappements ; à Vandoncourt de Marchand (20 ouvriers) et Mériot (10 ouvriers) pour les échappements et finissages, de Charles Peugeot pour Japy Frères (70 ouvriers) pour des finissages au Bas-des-Fonds ; à Mandeure de Coulon (40 ouvriers) pour des pignons...
Du milieu du 19e siècle à la Première Guerre mondiale
Sous le Second Empire, le pays de Montbéliard constitue le premier centre horloger français (il emploie 8 000 ouvriers en 1878 et en comptera 12 000 en 1900). Mais il est confronté à un nombre grandissant de difficultés, le marché devenant plus concurrentiel dans la deuxième moitié du siècle et plus particulièrement au cours du dernier quart. Période marquée par une grave crise mondiale - la « longue dépression » (1873-1896) - et le renforcement du protectionnisme de la plupart des pays industrialisés. La France doit aussi faire face aux conséquences de sa défaite en 1870 qui, outre le paiement d’une indemnité de guerre de cinq milliards de francs or, fait de l’Allemagne la « nation la plus favorisée » (avec allègement voire suppression des droits de douane). L’Exposition universelle qui se tient en 1876 aux Etats-Unis, à Philadelphie, révèle par ailleurs que les Américains ont mécanisé à outrance la fabrication des montres, et pas seulement celle des ébauches, avec un souci de standardisation et d’interchangeabilité. Evitant au maximum les reprises à la main, ils limitent le nombre des calibres, en unifient les dimensions et spécialisent dans la fabrication d’un composant particulier des machines qui, une fois réglées, le produisent en très grosses quantités et sans variation de cote. Leur production s’élève à 250 000 montres en 1876 ; en 1880, elle est de 350 000 pièces - dont 190 000 pour la Waltham Watch Company (882 000 en 1889) et 100 000 pour l’Elgin Watch Company (500 000 en 1889) - tandis que la France en produit 500 000 et la Suisse 1 500 000. A l’inverse de la France, cette dernière a pris le virage de la mécanisation et de la concentration en usines, et l’Allemagne lui emboîte le pas.
Face à cette concurrence (suisse pour les montres et allemande pour les pendules, avec l’essor des coucous de la Forêt Noire) et à la fermeture du marché américain, les leaders de la production d’ébauches que sont les Japy ne trouvent comme solution dans un premier temps, pour réduire leurs prix de revient, que l’abaissement des salaires. D’où la montée des mécontentements malgré le système social anciennement mis en place. Et cela alors que les ateliers d’horlogerie de l’usine des Fonteneilles (à Beaucourt) sont entièrement détruits par un incendie le 23 janvier 1881, entraînant un arrêt de la fabrication pendant six mois (ils sont rapidement rebâtis, en briques avec poteaux en fonte, par la société d’ingénierie lilloise E. et P. Sée, spécialisée dans les bâtiments industriels incombustibles). Malgré l’achat de machines aux Etats-Unis dès 1879, Japy - qui devient Japy Frères et Cie en 1882 - n’arrive pas à adopter la mode de fabrication américain. Pour sauvegarder ses marges sur les ébauches de montres, la société s’entend avec ses concurrents et le 20 décembre 1887 est fondé le Syndicat des Fabriques d’Ebauches suisses et françaises, réunissant 36 des 40 établissements existants (dont trois français : Japy frères, Albert Parrot à Montbéliard, Parrenin et Marguet à Villers-le-Lac). Le but : établir un tarif commun et simplifier ou harmoniser les calibres afin de favoriser l’interchangeabilité. Cette tentative de regroupement échoue en 1891. Elle redémarre avec la Société des Fabriques d’Ebauches, regroupant 23 sociétés (dont trois françaises : L.-P. Japy et Cie à Seloncourt, Parrenin et Marguet et Virgile Cupillard à Villers-le-Lac), qui ouvre en 1894 le Comptoir général des Ebauches (avec succursales en France à Montbéliard et Morteau) mais disparait l’année suivante (une nouvelle tentative d’union aura lieu de 1906 à 1912 sous le nom de Groupement des Fabriques d’Ebauches suisses et françaises).
La société s’engage toujours plus avant dans la fabrication des produits finis. En 1889, elle peut ainsi fabriquer chaque jour 1 000 à 2 000 « pendulettes, réveils ronds, carrés, réveils à musique, réveils-sonnerie, huitaines, répétitions-réveils etc., montés dans des boîtes d’une grande variété de formes et de modèles » et 1 000 à 1 200 montres (puis 1 500 en 1893) ; chaque mois sont aussi réalisées 6 000 montres, destinées aux Etats-Unis, « dont le mouvement n’est qu’un diminutif des mouvements de pendulettes » (Garnier, Paul. Classe 26 Horlogerie. Rapport du Jury international, 1891, p. 697.). La production totale annuelle de montres s’inscrit dans une fourchette de 300 000 à 400 000 pièces, autant que de blancs. L’entreprise construit en 1892 à la Pendulerie un nouveau bâtiment (sur le modèle de celui de 1881), avec atelier de montage des montres au rez-de-chaussée, des réveils et pendules aux 1er et 2e étages, magasin de pièces détachées dans le comble. Elle rencontre des difficultés nouvelles pour elle, ainsi résumées en février 1885 par ses représentants à Besançon, Sandoz Frères : « jadis un calibre mettait dix ans à passer de mode. Aujourd’hui grâce au progrès, tous les six mois c’est une modification nouvelle qui bouleverse tout. » (Lettre du 21 février 1885 par Sandoz Frères. Citée par : Lamard, Pierre. Histoire d’un capital familial au XIXe siècle [...], 1984, p. 283.). Peut-être est-ce là la raison de l’ouverture d’éphémères ateliers d’horlogerie au tournant du siècle, à Besançon (1894-1901) et en Suisse (La Chaux-de-Fonds 1894-1897 et Bienne 1898-1906).
Cette période voit la disparition des sociétés Migot en 1874 et Beurnier Frères cinq ans plus tard, mais aussi des créations d’entreprises, qui s’orientent vers la fabrication de la montre complète en réaction à une grave crise horlogère en 1881. Le précurseur semble être Paul Japy, fils de Louis, qui a pris la succession de son père (et auquel succèdera son propre fils Albert Paul).
Ainsi, à Seloncourt, le Suisse Albert Guinand, installé à Besançon, reprend à cette époque l’atelier d’échappements bâti en 1857 par Frédéric Coulon et y installe une fabrique de montres. Il vient avec une partie de son personnel mais repart assez rapidement pour Besançon. En 1877, Louis Boname achète l’ancienne fabrique de limes créée en 1851 par Louis Galley (17 rue d’Audincourt). Il fait construire de l’autre côté du ruisseau une fabrique de mouvements de montre, qu’il convertit ensuite à la réalisation des montres complètes bon marché (vendues par Gustave Ulmann, de Montbéliard). Il emploie près de 120 ouvriers en 1893, élargit sa production à l’horlogerie de gros volume pour laquelle il fait bâtir entre 1900 et 1905 une fonderie de laiton et de bronze. Au tournant des 19e et 20e siècles, Edouard Hosotte reprend l’usine Vuillequez et y fabrique des montres, notamment le modèle dit « Centenaire » (commémorant l’arrivée de Mégevand à Besançon), dans lequel la plupart des vis ont disparu (remplacées par des clavettes). Son entreprise vend en 1913 160 891 montres et 35 000 instruments de précision (curvimètres, podomètres, sphéromètres, etc.). En 1902, Albert Beaudroit succède à son père Alphonse, qui avait établi en 1866 une petite fabrique d’horlogerie, augmentée d’un atelier vers 1894 (60-64 rue du Général Leclerc). Beaudroit fils y produit des montres, avec 70 ouvriers. Il décède en 1918 et son beau-frère poursuit cette fabrication pendant trois ans encore. Citons encore les fabriques d’ébauches et échappements Cramotte et Louys vers 1870, de boîtes de montre Henry en 1873, d’ébauches de montres et de montres fondée en 1890 par Colomban Muth - quittant l’Alsace occupée - et ses associés (30 ouvriers), de montres Paicheur, Rantz et Cie créée en 1898 lorsque Joseph Rantz et Louis Paicheur se séparent de Muth, d’Eugène Megnin en 1909, etc. En 1894-1895, Frédéric (Fritz) Wittmer, François Roy et Jules Hebmann installent au 28 rue du Général Leclerc une fabrique (de pignons pour pendules, réveils, régulateurs, télégraphes et appareils de précision), qui revient rapidement au seul Wittmer alors que ses associés conservent l’usine d’horlogerie qu’ils viennent de faire bâtir à Hérimoncourt (16-18 rue du 9ème Zouaves).
A Vieux-Charmont, Jean Frédéric (dit Fritz) Marti, neveu de Samuel Marti, fonde en 1870 la société d'horlogerie Fritz Marti et Cie qui devient en 1874 la Manufacture d’horlogerie de Charmont. Elle se dote en 1871 (au 10 route de Belfort) d’une usine de grosse horlogerie, régulièrement agrandie à la fin du 19e siècle et au début du 20e. Lui succède en 1900 la société en nom collectif Fritz Marti et Fils, dirigée par Frédéric Auguste Marti, fils de Fritz et ingénieur centralien, qui oriente la production vers la petite mécanique de précision pour l'automobile et la petite serrurerie. A Héricourt, Adolphe Mougin crée en 1872 sa fabrique d’ébauches de pendules, reprise par ses fils après sa mort en 1889 et dotée de nouveaux bâtiments. Elle emploie 72 personnes en 1893, 183 lorsqu’elle fait faillite en 1902 (l’usine a été démolie dans les années 1970). A Sainte-Suzanne, Charles-Auguste et Henry L’Epée, qui ont pris la suite de leur père en 1875, agrandissent l’usine d’où sortent en 1900 près de 24 000 porte-échappements (la fabrication de ceux à cylindre sera mécanisée en 1909, de ceux à ancre en 1911) et 150 000 petites boîtes à musique pour enfants (délaissée par la clientèle, cette production cessera en 1914).
Après la Première Guerre mondiale
La population horlogère de la région de Montbéliard paie elle-aussi son tribut à la Grande Guerre. Les horlogers français étant sous les drapeaux, cette guerre ouvre largement le marché national aux montres helvétiques. Elle prive en outre la Suisse d’une partie de ses approvisionnements ce qui la conduit à développer ses propres fabriques, concurrençant les entreprises françaises. Avec bonheur puisqu’à la fin des années 1930, la France importera 70 % de ses composants de base (ébauches notamment, secteur dominé par la société suisse Ebauches SA créée en 1926). La crise de 1929 ajoute encore aux difficultés de la profession, qui voit nombre d’affaires souffrir puis disparaitre. Ainsi par exemple, à Seloncourt, celles qui passent le cap de la Deuxième Guerre mondiale se sont généralement reconverties dans la mécanique générale.
Japy Frères et Cie (devenue SA en 1928 afin de bénéficier de capitaux extérieurs) va disparaitre dans les années 1950. La société, qui connait des problèmes de gérance aigus, s’est progressivement repliée sur elle-même, ayant perdu le sens de l’innovation, dotée d’un matériel vieillissant, hypertrophiée du fait de la multiplication des produits fabriqués et concurrencée par l’essor de nouvelles industries (telle la construction automobile). La qualité de ses fabrications horlogères s’est dégradée, d’autant qu’elle est restée fidèle à un positionnement sur la montre bon marché. Malmenée par les crises coutumières à cette industrie, elle engage en 1932 une réorganisation et regroupe ses activités horlogères à Beaucourt et Badevel. Ce dernier site est doté de nouveaux ateliers en 1921 (il réunit 476 personnes en 1926) mais il périclite après la crise de 1929 et ferme ses portes en 1935. A Beaucourt, où l’usine des Fonteneilles s’est spécialisée dans la fabrication des machines à écrire, la Pendulerie est réaménagée et modernisée en 1947 pour abriter de nouveaux ateliers d'horlogerie, produisant des mouvements de réveil et de pendule (50 000 à 60 000 en 1949). L’état général de l’entreprise conduit en 1954 les financiers qui en ont pris le contrôle à la scinder en quatre sociétés autonomes. La branche horlogerie est alors vendue à un concurrent de Japy : la société Jaz, fabrique de réveils fondée à Paris en 1919 sous le nom de Compagnie industrielle de Mécanique horlogère, disposant d’une unité à Wintzenheim (Haut-Rhin) et qui participera en 1978 à la création de France Montre électronique (Framelec) à Morteau. La Pendulerie ferme vers 1959 et les bâtiments sont détruits en 1978, à l'exception de l'extension de 1892, réhabilitée en 1984 par l'architecte Jean-Pierre Varin qui la transforme en logements.
A Seloncourt, les années qui suivent la crise de 1929 voient la disparition de nombreuses entreprises, telles les sociétés horlogères installées en 1920 dans les locaux de la fabrique de Louis Boname (17 rue d’Audincourt), fermée à la fin de la décennie 1910 : affaires suisses de Charles Vuilleumier (20 ouvriers en 1926, production d’ébauches et de finissages de montres, arrêtée en 1930) et de Devaux et Meinen (décolletage de précision, de 1920 à 1931), et française avec Donzé (dorage et argentage des cadrans d’horlogerie, jusqu’à l’incendie de 1932). Celle d’ébauches de montre créée par Victor Boname (ou Boname-Beaudroit), un neveu de Louis (23-25 rue d’Audincourt), disparait vers 1930 (elle employait 65 ouvriers en 1912, 30 en 1926). La fabrique Paicheur, Rantz et Cie (montres) disparait en 1932, l’usine de Berne appartenant à la SA des Ets A. Paul Japy (106 ouvriers en 1930) est liquidée en 1932. Cette dernière est achetée en 1943 par Georges Wittmer, qui a repris en 1907 l’affaire de son père Fritz (28 rue du Général Leclerc) et fabrique entre les deux guerres des pièces détachées pour la grosse horlogerie, minuteries, compteurs, déclencheurs, etc. Il emploie 59 ouvriers en 1930, 100 en 1941. Wittmer transfère à Berne l’activité horlogère, qui cède rapidement la place à une activité de sous-traitance pour l'automobile et l'armement (découpage, emboutissage et décolletage) sous la raison sociale La Bernoise - Ets Wittmer.
La deuxième Guerre mondiale et l’immédiat après-guerre sont un autre temps fort des disparitions et des reconversions. La fabrique Cramotte et Louys, qui s’est dotée en 1926 d’un nouvel atelier (rue des Auges), cesse son activité en 1942 ; celle des Fils de Georges Megnin (mouvements de pendules) - réunissant Eugène, Georges et Henri, à la Stauberie - est convertie en 1946 à la mécanique générale tandis que l’affaire créée par Eugène en 1909 (rue Sous-Vraimont) est active jusqu’en 1950 (elle a été reprise par son fils Pierre et fabriquait des mouvements à sonnerie pour pendules de cheminée).
La longévité est plus grande pour l’entreprise Beaudroit (60 et 64 rue du Général Leclerc), qui poursuit son activité horlogère jusqu'au milieu des années 1960 : l’usine - dont l’activité est élargie au décolletage - est dirigée jusqu’en 1947 par Emile Mettey, l’atelier adossé au logement patronal abrite à partir de 1928 la fabrique de boîtes de montre de Fernand Peronne. La société Hosotte (aux Noyers) compte environ 200 ouvriers en 1924 lors de sa reprise par les fils d’Edouard Hosotte, Edgard et Marcel. Les Ets Hosotte et Cie cessent la production des montres en 1932 et réalisent ensuite compteurs, timbres avertisseurs, dynamos et phares pour bicyclettes, lampes à carbure, rétroviseurs, etc. (ils se qualifient de Manufacture d’Accessoires pour Cycles, Motos et Automobiles), jusqu’à leur dépôt de bilan en 1959 (une centaine de personnes). Le département mécanique de précision est alors acquis, avec une partie des bâtiments, par les Ets René Marti, qui produisent jusqu’en 1970 de l’horlogerie de marine, des pendules, des baromètres et des compteurs enregistreurs. La société Les Fils de C. Muth (rue des Vignottes), qui a élargi ses activités aux fournitures diverses pour l’horlogerie et au décolletage, disparait en 1981 (18 ouvriers).
A Montbéliard, l’usine de la Prairie, tenue par la société Amédée Roux et Cie, s’était encore plus diversifiée vers 1890 : mouvements de phonographes, compteurs à prépaiement, compteurs automobiles, taximètres, indicateurs de vitesse, cylindres enregistreurs, allumeurs-extincteurs, constateurs d'arrivée de pigeon-voyageurs, etc. Elle agrandit ses locaux vers 1895 (fonderie et atelier de laminage et de tréfilerie de laiton et de bronze créés dans le troisième quart du 19e siècle), alors qu’elle emploie 160 ouvriers et 60 femmes et enfants, et en 1902 (usine à vapeur). Elle ferme toutefois ses portes en 1929 (57 personnes en 1926) et les bâtiments sont démolis par la suite.
A Vieux-Charmont, Fritz Marti et Fils (10 route de Belfort) a élargi ses activités à la petite mécanique de précision pour l'automobile et la petite serrurerie. Elle emploie 85 personnes en 1926 et 112 en 1930 (puis 400 en 1958). Après la Deuxième Guerre mondiale, l'usine se spécialise dans la mécanique de précision pour l'industrie automobile, aéronautique et navale, et abandonne la fabrication horlogère en 1955.
A Hérimoncourt, l’usine d’horlogerie tenue par Jules Hebmann (16-18 rue du 9ème Zouaves), qui compte 66 ouvriers en 1926, cesse son activité juste après la Deuxième Guerre mondiale.
A Sainte-Suzanne, la fabrique de Frédéric L’Epée est reprise en 1925 par son fils Henry, qui développe la fabrication des porte-échappements et diversifie sa production (baromètres, altimètres puis appareils d'horlogerie). Les effectifs gonflent (52 personnes en 1930, 134 en 1955, 260 en 1962 puis 600 en 1970), d’où la construction de nouveaux ateliers (en 1950 et vers 1963) et l’ouverture d’unités secondaires dans le Haut-Rhin à Saint-Louis (1950-1969) et Sainte-Marie-aux-Mines (1960-1969). Elle réalise des porte-échappements synchronisés (pour les sociétés Kienzle, Wener, Siemens, AEG, etc.) : 750 000 unités en 1963, 1 110 000 en 1968. En difficulté au début des années 1970 du fait du changement de technologie (arrivée du quartz en horlogerie), elle est reprise en 1975 par Matra-Manurhin, rebaptisée Société nouvelle L'Epée et dédiée à la fabrication complète des pendulettes de luxe et de celles dites « d'officier » (10 000 pièces en 1985), ainsi que des mécanismes pour l'armement (jusqu'en 1983). Les effectifs décroissent (420 personnes en 1974, 250 en 1982, 115 en 1986) et, après la valse habituelle des financiers repreneurs, elle dépose son bilan en 1995.
Ainsi s’achèvent deux siècles d’horlogerie dans le pays de Montbéliard.
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Période(s)
- Principale : 18e siècle, 19e siècle, 20e siècle , daté par source, daté par travaux historiques
Dans la première moitié du 19e siècle, les industriels privilégient la construction d'ateliers sur plusieurs étages, adoptant une organisation verticale. Cette disposition permet de réunir un maximum d'ouvriers et de machines de production sur trois ou quatre niveaux, tout en bénéficiant d'un éclairage optimal pour des façades très ajourées. Le comble est fréquemment aménagé, parfois sur plusieurs niveaux (deux à l'usine Japy de Badevel), donnant au bâtiment cet aspect particulier avec un toit dont les longs pans sont interrompus par une rangée continue de fenêtres accolées. La fabrique prend souvent la forme d'une grande bâtisse rectangulaire, construite en moellon de calcaire enduit et couverte d'un toit à longs pans avec demi-croupes. Alors que la brique est peu utilisée comme matériau de gros oeuvre, l'usine des Fonteneilles à Beaucourt fait exception : détruite par un incendie début 1881, elle a été reconstruite par la société d'ingénierie lilloise E. et P. Sée, spécialisée dans les bâtiments industriels incombustibles. La plupart du temps, les briques sont visibles dans les encadrements de baies, au nombre et au format parfois généreux pour favoriser l'éclairage. Le shed, type de toiture importé d'Angleterre et qui fait florès à la fin du 19e siècle, se rencontre jusque sur les plus petits ateliers.
- (c) Région Bourgogne-Franche-Comté, Inventaire du patrimoine
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Documents d'archives
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[Catalogue horloger Japy], 1935
Bibliographie
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Favereaux, Raphaël. Architecture et industrie, Territoire de Belfort / Direction régionale des Affaires culturelles de Franche-Comté, Service régional de l'Inventaire ; photogr. Yves Sancey. - Levallois-Perret : Erti, 2004. 75 p. : ill. ; 30 cm. (Images du Patrimoine ; 230).
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Favereaux, Raphaël. Le pays de Montbéliard et son patrimoine industriel / Région Franche-Comté, Direction de l’Inventaire du Patrimoine ; photogr. Jérôme Mongreville ; cartogr. Mathias Papigny. - Lyon : Lieux Dits, 2014. 128 p. : ill. ; 30 cm. (Images du Patrimoine ; 286).
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Favereaux, Raphaël ; Poupard, Laurent. Franche-Comté, terre d'industrie et de patrimoine / Région Bourgogne-Franche-Comté, Service Inventaire et Patrimoine ; photogr. Sonia Dourlot, Jérôme Mongreville, Yves Sancey ; dessins Mathias Papigny, Aline Thomas ; cartogr. Pierre-Marie Barbe-Richaud, André Céréza. Lyon : Lieux Dits, 2021. 416 p. : ill. ; 30 cm.
P. 156-163 : ill. -
Garnier, Paul. Classe 26 Horlogerie. Rapport du Jury international. Dans : Ministère du Commerce, de l'Industrie et des Colonies. Exposition universelle internationale de 1889 à Paris. Rapports du jury international. Groupe III. Mobilier et accessoires. Classes 17 à 30. - Paris : Imprimerie nationale, 1891, p. 683-719.
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Grassias, Ivan. Sur les traces de "l'empire" Japy. – Salins-les-Bains : MTCC, 2001
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L'horlogerie, fille du temps : actes du cycle de conférences dans le massif du Jura, septembre 2016-juin 2017. - Besançon : Association française des amateurs d'horlogerie ancienne, 2017.
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Lamard, Pierre. Histoire d'un capital familial au 19e siècle : le capital Japy (1777-1910). - Belfort : société d’Emulation, 1988, 358 p.
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Lardière, Bernard. Japy. Sites et architecture : Franche-Comté / Direction régionale des Affaires culturelles de Franche-Comté, Service régional de l'Inventaire ; photogr. Yves Sancey, Jérôme Mongreville. - Paris : Erti éditeur, 1993. 44 p. : ill. ; 30 cm. (Images du Patrimoine ; 35).
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Muston, Etienne (Dr). Recherches anthropologiques sur le pays de Montbéliard. 1re partie. Mémoires de la Société d’Emulation de Montbéliard, 1866, 2e série, 3e vol., p. 5-456.
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Notice sur les fabriques et manufactures du département du Doubs, qui ont fourni des échantillons pour l’exposition publique des produits de l’industrie française, du 25 août 1819. Annuaire statistique et historique du département du Doubs pour l’année bissextile 1820.
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Seloncourt : deux siècles d’industrie / Les Amis du Vieux Seloncourt. – Seloncourt : Les Amis du Vieux Seloncourt, 1998.
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Turgan Julien. Les grandes usines de France : tableau de l'industrie française au 19e siècle, 1860-1892. - Paris : Librairie nouvelle : A. Bourdilliat et Cie : Michel Lévy frères : Calmann-Lévy : Librairie des dictionnaires, 19 volumes, 6131 p.
Documents figurés
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Usines Japy Frères et Cie. Beaucourt (chef-lieu). Fabrique d'Horlogerie (petit volume), Visserie, Quincaillerie, Serrurerie et Fonderie [vue cavalière]. Lithographie (?), Lemercier imp. (Paris), s.d. [milieu 19e siècle].
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Maisons bâties à Beaucourt (Haut-Rhin) [...] : plan du rez-de-chaussée. Plan. Dans : " Etablissements de Japy Frères et Cie à Beaucourt - Haut-Rhin. Note sur les ouvriers [...] ", 1868.
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Gravure, s.n., s.d. [fin 19e siècle], auteur inconnu
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Photogr., s.n., s.d. [fin 19e ou début du 20e siècle], auteur inconnu
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Photogr., s.n., 1890, auteur inconnu
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Document publicitaire, s.n., s.d. [début du 20e siècle], auteur inconnu
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Plan monumental des grandes usines [...]. Ateliers de grosse horlogerie Japy Frères et Cie. Badevel [détail] / Auteur inconnu, dessin, s.d. [début 20e siècle].
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Atelier de montage des réveils (dans la Pendulerie). Photographie, s.d. [vers 1948-1950].
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Photogr., s.n., s.d. [fin 19e siècle ou début 20e siècle], auteur inconnu
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Atelier de fabrication : vue intérieure du deuxième étage de comble. / Blandin Patrick (photographe), photogr., 1978
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Photogr., s.n., s.d. [avant 1980], auteur inconnu
Raphaël Favereaux, chercheur. Région Bourgogne-Franche-Comté, Service Inventaire et Patrimoine, 1995-
Poupard, Laurent. Chercheur au service Inventaire et Patrimoine de la Région Bourgogne-Franche-Comté, 1987-
Raphaël Favereaux, chercheur. Région Bourgogne-Franche-Comté, Service Inventaire et Patrimoine, 1995-